2006-08-27

Le crochet pour faire jaser…

La communication, prise dans le sens savant du terme, est un phénomène curieux. Selon l’endroit où elles prennent place, certaines activités, surtout lorsqu’elles sont pratiquées par des personne à qui elles semblent aller comme un gant, ont pour effet de rapprocher les gens et de les inciter à parler, à échanger.

Le tricot au crochet dans le métro en est un bel exemple.

« Pendant 29 ans, raconte Claire Le Houx, j’ai pris l’autobus et le métro pour me rendre au Centre de santé et des services sociaux du Montréal métropolitain, où j’étais travailleuse sociale professionnelle. Entre Cartierville et le Centre-Sud de Montréal, la route est longue, j’ai donc entrepris des travaux de tricot au crochet, pour passer le temps.

« Je crochetais des nappes par carrés. En d’autres termes, je crochetais des carrés de dentelle et le soir, de retour à la maison, je les assemblais. Je crochetais aussi des napperons pour décorer les meubles, servir de sous-plat ou mettre un objet en valeur. J’en ai fait beaucoup. Tellement que je ne sais plus combien de boîtes de fil j’ai achetées, en gros, chez Duranleau, un fournisseur aujourd’hui disparu du Vieux-Montréal où je me rendais en métro.

« Dans l’autobus ou dans le métro, vous ne pouvez pas imaginer à quel point un simple travail de tricot peut attirer le regard des autres voyageurs, susciter l’intérêt et parfois amener les gens à se confier.

« Un jour, un homme a changé de siège pour se rapprocher de moi et me dire à quel point je lui rappelais sa grand-mère, ce qui ne me rajeunissait pas. Il m’a confié que cela le ramenait dans les belles années de son enfance où tout était plus simple, à une époque où on avait le temps de prendre son temps et d’échanger avec tout un chacun.

« Une autre fois, j’ai pu lire l’émerveillement dans les yeux d’un petit garçon venu se planter devant moi pour mieux m’observer, et finalement me demander d’où sortait le fil que je crochetais et qui faisait grandir le carré.

« Des scènes comme celles-là, il y en a eu beaucoup. On aurait dit que de voir une femme tricoter en y prenant plaisir avait quelque chose d’apaisant et de rassurant.

« Vive le métro, pour toutes ces belles rencontres qu’il m’a permis de faire! »

Claire Le Houx, religieuse chez les Sœurs de la Providence, est aujourd’hui à la retraite, ce qui ne l’empêche pas de faire du bénévolat auprès des malades, dans les hôpitaux où elle distribue la communion, et de continuer de crocheter dans l’autobus et le métro qu’elle emprunte toujours pour sillonner la ville.
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Tiré du journal La Presse, "Le métro de Montréal, 40 ans d'histoire" , 14 octobre 2006

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